Dalal el-Adm : « En trois ans, Les Amis du Liban à Monaco ont toujours été près de nous »
Les Amis du Liban n’ont jamais cessé d’aider les sinistrés sur place. Trois ans jour pour jour après la double explosion du port de Beyrouth, sa fondatrice et présidente, Bouran Hallani, se souvient encore de ce terrible 4 août 2020. Deux semaines après la catastrophe, elle croise le regard de Dalal el-Adm, qui aide les siens alors qu’elle vient elle-même de perdre sa fille. Une histoire bouleversante que nous a racontée l’intéressée, insistant sur le rôle salvateur de l’association monégasque.
4 août 2023, 15h24
Il faut s’y prendre à plusieurs fois pour que la communication soit bien établie par téléphone avec Dalal el-Adm en fin de matinée. Les coupures électriques au Pays du Cèdre sont monnaie courante et illustrent la triste réalité quotidienne de la population, toujours en proie à d’immenses difficultés, trois ans après la double explosion survenue dans l’enceinte portuaire de Beyrouth.
Si cette date du 4 août est désormais synonyme de deuil annuel pour les Libanais, elle l’est d’autant plus pour Dalal el-Adm qui a perdu « celle qui représentait toute ma vie », sa fille Krystel, tragiquement décédée à 35 ans. « Elle avait passé dix ans à l’étranger où elle avait notamment travaillé à Paris et à Genève dans une banque. Krystel avait insisté pour rentrer au Liban où existe cet esprit de famille. Elle s’y sentait bien et avait un bon poste. C’est elle qui aidait les paroissiens déjà avant la catastrophe ».
Dalal el-Adm tient le portrait de sa fille Krystel, décédée le 4 août 2020 à Beyrouth, aux côtés de deux bénévoles des Amis du Liban à Monaco © Les Amis du Liban
L’association monégasque mobilisée depuis trois ans
L’émotion est palpable dans la voix. Elle enchaîne avec conviction : « Avec Les Amis du Liban à Monaco, nous nous sommes rencontrés sur les lieux du crime. C’était la providence, avec tout ce que l’on avait enduré. Bouran m’a enlacée. Je ne la connaissais pas et elle m’a demandé comment elle pouvait nous aider ».
Le début d’une relation basée sur l’entraide et la solidarité. « En trois ans, ils ont toujours été près de nous. Les Amis du Liban à Monaco ont créé du lien avec les familles en distribuant les colis directement chez eux, même pendant la covid. Il y a eu un réel élan », souligne Dalal el-Adm.
Outre l’aide humanitaire, les colis alimentaires, les containers, les fournitures de réchauds et ventilateurs, l’ameublement des maisons des sinistrés, c’est l’approche sociale qui est mise en lumière. Une aide « du fond du cœur », résume Dalal el-Adm. Si le temps panse les blessures, les Libanais peinent toutefois à s’en sortir.
Préparation à la distribution de colis alimentaires sur place © Les Amis du Liban
« Les classes moyennes n’existent plus »
« La première année, on ne trouvait pas une bougie ou une allumette, c’était l’apocalypse, on se sentait abandonné. Aujourd’hui, le problème reste la crise économique qui touche les plus démunis. Les classes moyennes n’existent plus », relate-t-elle. Même les Libanais qui travaillent n’arrivent pas à joindre les deux bouts, la devise locale ne représentant « rien ».
De son côté, Dalal el-Adm a créé une fondation qui porte le nom de sa fille. Elle vise à soutenir les établissements scolaires, en payant les fournitures ou certaines installations, et à financer la scolarité des élèves. « On tient beaucoup à ce que les écoles ne ferment pas, car nous ne souhaitons pas de délinquance. Le Liban s’est toujours distingué par l’éducation de ses enfants et nous aimerions continuer de subvenir à leurs besoins », plaide-t-elle. En trois ans, 150 élèves et 26 écoles à travers le Liban ont ainsi bénéficié de la générosité de la fondation.
© Les Amis du Liban
Les Amis du Liban à Monaco deux fois par mois sur Nice
Pour sa part, Bouran Hallani explique que l’association monégasque poursuit effectivement la livraison mensuelle de colis alimentaires : « Nous avons un listing de 630 familles inscrites et nous arrivons à en aider entre 200 et 300 chaque mois ». En revanche, aucune collecte de denrées alimentaires n’a été organisée cet été en Principauté, comme l’an passé d’ailleurs, les gens étant « trop sollicités » sur divers fronts humanitaires. Néanmoins, un nouveau containeur sera envoyé fin septembre.
L’association est aussi mobilisée localement. Deux fois par mois sur Nice, elle aide 80 familles en leur apportant des colis alimentaires ou encore, plus récemment, des habits d’enfants, grâce à la participation d’une autre initiative monégasque, Nous 2 Mains, créée par Alyssia Ballerio.
Délia KRIEL